Edito du Président du 22 octobre 2018

Face à la pénurie de sperme qui vient…Edito du Président, Patrice Obert et Michel Simonnet du 22 octobre 2018
Dans le débat actuel sur la PMA, il est impossible de se limiter aux seules attentes de certaines femmes seules et couples de femmes et d’ignorer celles des autres acteurs impliqués dans ce projet de PMA, à savoir les hommes, donneurs de sperme et les futurs enfants qui souhaiteront remonter à leurs origines biologiques. Avec l’égalité des droits entre hétérosexuels et homosexuelles et la liberté « qui ne nuit à autrui » il devrait y avoir une solution et l’affaire devrait être rondement réglée ! Et pourtant …Les hommes font une résistance silencieuse et ne sont pas coopératifs, concrètement parlant ! Les résultats de cette résistance sont bien réels et il y a déjà pénurie de sperme. Le professeur Fabrice Guérif de Toulouse le souligne, 3000 couples hétérosexuels attendent et le délai d’attente est de 12 à 15 mois. Avec moins de 255 donneurs en 2015, voici une massive et sourde opposition de la gent masculine et cette opposition n’est pas le signe d’une quelconque homophobie.Cette opposition masculine si forte est étrangement invisible car elle passe sous les radars des sondages incapables, par construction, de saisir cette réticence à « donner ». Car la question non posée est de savoir si vous, homme sondé de moins de quarante-cinq ans et en bonne santé, irez donner votre sperme. Ici, on ne vote pas avec ses pieds mais avec son sexe ! Bel engagement! C’est bien un refus « populaire » instinctif et le refus du fichage de chaque donneur qui, avec sa fiche produit présentant ses caractéristiques biologiques, devient une marchandise.Car pour donner, il faut être impliqué dans le projet et en être fier comme lorsqu’on donne son sang pour le bien des autres, de ses proches. Il ne peut pas y avoir un don, secret, anonyme, honteusement caché aux autres ! La transparence est à la base de notre vie démocratique et personnelle !Cette transparence s’impose de soi dans la PMA, pour deux raisons : à l’heure de la traçabilité, c’est un jeu d’enfant à partir de l’ADN de retrouver le père biologique et la relation d’amour maternel se doit d’ intégrer d’une manière ou d’une autre ce père biologique qui surgira un jour ou l’autre. Quand lever cet anonymat ? Faut-il attendre 18 ans ? Pourquoi alors ne pas le lever dès le projet de conception ? Et comment le donneur fera, de son côté, face à sa propre famille, son épouse et ses enfants reconnus ?En conclusion, il n’y a pas de réponse simpliste par oui ou par non à la question de l’extension de la PMA. Les Poissons Roses ont élargi la « focale » dans leur rapport sur « La famille durable » et défendent le « statu quo » en s’appuyant sur la liberté et la responsabilité de chacun. Ils ont entendu la souffrance des femmes seules ou en couples ayant un désir de maternité. Plus que jamais, nous rappelons notre demande d’Etats généraux de la Famille durable et nous réclamons dans l’immédiat une étude d’impact de la future loi bioéthique sur les conditions pratiques de sa mise en œuvre.
Sur la Loi d’Organisation des Mobilités (L.O.M)Vérité du coût des transports : un levier pour réguler l’économie-mondeEdito du Président, Patrice Obert  du 1er décembre 2018
Qui ne s’est jamais étonné de découvrir sur les étals de son marché des fraises en plein hiver ?  Ou de recevoir un livre commandé à Amazon au même prix que le bouquin qu’il aurait pu se procurer chez son libraire ? Ou  de constater que la tonne de charbon importée de Pologne soit moins chère que celle extraite de nos mines ?  Quel est le lien entre ces trois informations ? Le coût du transport  entre deux territoires. Dans un livre récent, Henri Rouillé d’Orfeuil,(« Transition agricole et alimentaire, », sous-titre La revanche des territoires, Editions Charles Léopold Mayer, 2018) spécialiste des systèmes agricoles et alimentaires, fait remonter au Moyen-Âge le début  de la confrontation entre une économie mondialisée et des économies territorialisées. Celle-ci s’est soldée, aujourd’hui, par la victoire de la première sur les secondes. Ce qui est valable pour les questions alimentaires vaut pour l’ensemble du système économique.  L’abolition des distances est un des vecteurs de cette victoire et du retrait des territoires. Retrait et non disparition, car ils restent bien présents, espaces de la vie humaine, réserves de ressources naturelles,  lieux de construction des paysages et d’expression des cultures. Tandis que  l’abolition des distances s’est réalisée par la minoration du coût des transports. Que ce soit les transports maritimes, aériens, ferrés ou routiers. Avec, toujours, les deux mêmes mécanismes en cause, le non prise en compte du coût écologique des transports et la minoration des salaires des employés des secteurs concernés.C’est au prisme de cette réalité si prégnante, bien qu’ignorée, que la politique  des  transports du Gouvernement doit être lue et que l’enjeu de la future loi d’orientation des mobilités, présentée le 26 novembre dernier par Elisabeth Borne, Ministre des Transports, doit être apprécié. Ce qui ne peut se faire que dans une juste évaluation et optimisation de la politique des mobilités organisée au sein de l’Union Européenne. Une politique qui peut se résumer en une phrase : le transport doit être payé à son juste prix. Cela passe par la prise en compte de la situation des salariés des secteurs des transports, qui doivent être protégés, au même titre que les salariés des autres secteurs d’activité : reconnaissance des droits, application homogène des règles au sein de l’UE, notamment en cas de détachement, renforcement et fiabilisation des contrôles par la dématérialisation des procédures. Cela passe également par  le paiement effectif et au bon niveau du  prix du carbone, c’est-à-dire la prise en compte  de l’ensemble des coûts écologiques dans notre appréhension des différents modes de transports, de l’amont, au moment de la construction des infrastructures, jusqu’à l’aval, l’amortissement et l’exploitation. Selon deux principes simples à décliner secteur par secteur : « pollueur-payeur » et « utilisateur –payeur ». Agir ainsi, c’est   ouvrir le champ des mobilités  pour réinvestir la vie des territoires en s’appuyant sur les opportunités nouvelles offertes par les révolutions technologiques du digital, c’est donner leur juste place au ferré, au maritime, aux bus, à la voiture propre, aux véhicules autonomes, aux mobilités douces. Rendre à la distance parcourue sa juste place dans le bilan économico-socio-écologique d’une décision, c’est réguler de façon concrète la mondialisation. C’est en responsabilisant l’économie mondialisée sur  les aspects fiscaux, sociaux et environnementaux et en redonnant toute leur place aux territoires dans une proximité dynamique et reliante, que nous réussirons à  réconcilier le rat des villes et le rat des champs. C’est le chemin difficile que le Gouvernement aiguillonné par les Gilets jaunes, va tenter  de négocier. Les Poissons Roses ne peuvent que le soutenir dans cette démarche difficile.
     Plan pauvreté et reconversion des cathos sociauxEdito du Président, Patrice Obert et Michel Simonnet du 28 novembre 2018
Le Plan Pauvreté annoncée le 13 septembre dernier par le président de la République a été bien reçu, même s’il est passé, hélas, un peu inaperçu. Le mouvement des Gilets jaunes est l’occasion d’y revenir quelques instants. Fidèle à ses orientations, le président a refusé d’augmenter l’argent distribué (le fameux « pognon ») pour se focaliser sur la prévention et l’émancipation, deux critères chers à la gauche. Au titre de la prévention, le développement des modes de garde des tout-petits des familles défavorisées, l’accès à la cantine afin d’assurer une alimentation garantie, une série de mesures pour les jeunes sortant à 18 ans du dispositif. Au titre de l’émancipation, la volonté de « sortir de la pauvreté » sans oublier personne et de donner à chacun, par l’accompagnement et la reprise d’activité, la capacité à se remettre debout. Notons au passage la promesse en 2020 d’un revenu universel d’activité. On rappellera ici que la proposition N° 1 des Poissons Roses, dans leur manifeste A CONTRE COURANT (le Cerf 2016), était un Revenu de Libre Activité, afin de remplacer, comme fondement de nos sociétés, le « travail » par « l’activité ».
Comment ne pas se réjouir de ce vaste Plan Pauvreté pour les 14,2% de la population française, qui vivent avec moins de 1015€/mois pour une personne seule? Supprimer la pauvreté,  voici un vrai projet de société pris en charge par L’Etat, qui étend donc son action sur les services sociaux. Des salariés de l’action sociale vont prendre en charge les affaires dans le cadre d’un Service public de l’insertion. Une évolution normale de professionnalisation. La bonne volonté est remplacée par une expertise « certifiée ». Le traitement des « pauvres » rentre de manière structurée et coordonnée dans un plan, gage d’efficacité, mobilisant les acteurs de la société civile car la pauvreté est multiforme. Des moyens enfin « rationnellement » organisés vont réduire ces poches de pauvreté et améliorer le sort de la population. Oui, c’est une belle avancée de notre « État Providence » !
Nous souhaitons souligner deux écueils à éviter et relever une conséquence peut-être passée inaperçue. Le premier écueil est de créer un nouveau corps d’experts de la « pauvreté », fonctionnaires ou non, super assistantes sociales doublées de spécialistes en orientations scolaires et en recrutement, chargés d’assister les « pauvres » selon des procédures administratives nécessaires et tatillonnes. Le second écueil serait de considérer les « pauvres » non comme des personnes momentanément fragiles mais comme des mineurs incapables d’exprimer leurs propres besoins.(« Rendre visibles les Invisibles », tel est le thème du groupe de  travail des Poissons Roses animé par Michel Simonnet).
La conséquence passée inaperçue concerne les « cathos sociaux », tous ces catholiques, souvent de gauche, si investis dans l’action sociale et qui consacrent temps, énergie et argent à accompagner les personnes en difficulté, parfois sous le regard condescendant des nantis, sans se soucier des quolibets. Un engagement de vie, au point que certains peuvent parfois négliger le message évangélique et sa transmission, réduisant involontairement l’église à une super ONG.
Notre société matérialiste rêve d’apporter à tous le bonheur matériel sans se demander si là réside le vrai bonheur. Une fois les besoins primaires satisfaits, l’homme attend beaucoup plus. Le pape François nous fournit une « méthodologie » prémonitoire avec « Laudato Si », Peut-être l’occasion pour les « cathos sociaux », dont nous sommes, de redécouvrir leur mission de porter le message du salut dans notre monde.
     De Macron à Turgot, face à la grogne du pays     Edito du Président, Patrice Obert, du 23 novembre 2018
Un an et demi après l’élection d’Emmanuel Macron, alors que gronde la fronde des Gilets jaunes, de nombreux commentateurs cherchent à tirer un bilan de son action et à le ranger dans une des grandes catégories de la politique française : libérale, individualiste, ou encore bonapartiste. Exercice ardu quand on considère que l’intéressé se veut le porteur d’un « nouveau monde » et qu’il récuse un classement dans  des tiroirs inadaptés. L’exercice est d’autant plus difficile si on ne tient pas compte  du contexte. Il faut prendre en compte les situations française, européenne et internationale. Française, avec  le constat de trente ans de cogestion droite/gauche incapable de réformer le pays, la victoire progressive d’un néolibéralisme ayant acculé le PS à jouer la carte sociétale, enfin un abandon progressif de l’ambition européenne. Situation européenne avec  la prise de conscience des désastres d’une régulation incontrôlée, le culte du capitalisme financier, l’impuissance politique de la «vieille Europe » et le réveil de populismes qui conjuguent liberté économique et absence de démocratie politique. Internationaleenfin avec  le diagnostic de plus en plus partagé que nos sociétés vont se fracasser sur l’équation écologique,  la marchandisation et  la valorisation de l’individu.Sans oublier la nouvelle révolution technologique qui, de l’intelligence artificielle aux Big data en passant par la remise en cause du Vivant, interroge chacun d’entre nous, désormais acteur et voyeur du grand cirque planétaire. C’est à l’aune de ce contexte compliqué, alors qu’on voit apparaître aux Etats-Unis, en Russie, en Chine un nouveau type de dirigeant, que l’on doit regarder les difficultés actuelles que rencontre le président français.C’est là que la figure de Turgot surgit. Turgot, né en 1727 et mort en 1781, économiste, écrivain, collaborateur de l’Encyclopédie, devint à 53 ans contrôleur général des finances du roi Louis XVI, poste dans  lequel il restera  deux ans seulement,  s’activant  pour réduire les déficits, moderniser les impôts,  établir le libre-échange et tenter d’ abolir les privilèges. Il fut obligé de se retirer face à la coalition des mécontents : noblesse et Parlement outrés de ses attaques contre les privilèges, Cour, choquée de sa réforme de la Maison du roi, monde financier, mécontent de sa législation du libre-échange, clergé lassé de ses accès de tolérance envers les protestants, bourgeoisie parisienne irritée de son décret sur les jurandes. La monarchie ne se réformera pas et la Révolution française emportera tout l’édifice.Ce monde qui vacille, qui ne se pense plus, qui  ignore que ses fondements sont rongés, Turgot en avait conscience. L’analyse des discours prononcés par le président Macron donne une impression semblable : une conscience claire des dangers et des enjeux qui guettent le monde et l’ensemble de nos sociétés emportées dans une frénésie insupportable pour notre planète. D’où le projet politique qu’il a proposé aux Français : libérer les énergies, protéger et unir, en s’appuyant sur une Europe rénovée. Turgot fut visionnaire et échoua. L’ampleur des défis, qui dépassent le seul président français, nous laisse dans le doute, ouvrant deux voies conciliables : à court terme, l’encourager dans son déblocage de notre pays, à moyen terme, ne pas se satisfaire d’un emplâtre sur une jambe gangrenée et réfléchir aux bases du nouveau pacte social qui, irrémédiablement, un jour, surviendra et qui reposera sur une société de la réciprocité et du don, l’économie du partage, la politique de la vertu. C’est la voie choisie par les Poissons Roses.Si l’exemple de Turgot ne vous convainc pas, pensez à Mikhaïl Gorbatchev…

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