Plan pauvreté et reconversion des cathos sociaux

Edito du Président, Patrice Obert et Michel Simonnet du 28 novembre 2018
Le Plan Pauvreté annoncée le 13 septembre dernier par le président de la République a été bien reçu, même s’il est passé, hélas, un peu inaperçu. Le mouvement des Gilets jaunes est l’occasion d’y revenir quelques instants. Fidèle à ses orientations, le président a refusé d’augmenter l’argent distribué (le fameux « pognon ») pour se focaliser sur la prévention et l’émancipation, deux critères chers à la gauche. Au titre de la prévention, le développement des modes de garde des tout-petits des familles défavorisées, l’accès à la cantine afin d’assurer une alimentation garantie, une série de mesures pour les jeunes sortant à 18 ans du dispositif. Au titre de l’émancipation, la volonté de « sortir de la pauvreté » sans oublier personne et de donner à chacun, par l’accompagnement et la reprise d’activité, la capacité à se remettre debout. Notons au passage la promesse en 2020 d’un revenu universel d’activité. On rappellera ici que la proposition N° 1 des Poissons Roses, dans leur manifeste A CONTRE COURANT (le Cerf 2016), était un Revenu de Libre Activité, afin de remplacer, comme fondement de nos sociétés, le « travail » par « l’activité ».
Comment ne pas se réjouir de ce vaste Plan Pauvreté pour les 14,2% de la population française, qui vivent avec moins de 1015€/mois pour une personne seule? Supprimer la pauvreté,  voici un vrai projet de société pris en charge par L’Etat, qui étend donc son action sur les services sociaux. Des salariés de l’action sociale vont prendre en charge les affaires dans le cadre d’un Service public de l’insertion. Une évolution normale de professionnalisation. La bonne volonté est remplacée par une expertise « certifiée ». Le traitement des « pauvres » rentre de manière structurée et coordonnée dans un plan, gage d’efficacité, mobilisant les acteurs de la société civile car la pauvreté est multiforme. Des moyens enfin « rationnellement » organisés vont réduire ces poches de pauvreté et améliorer le sort de la population. Oui, c’est une belle avancée de notre « État Providence » !
Nous souhaitons souligner deux écueils à éviter et relever une conséquence peut-être passée inaperçue. Le premier écueil est de créer un nouveau corps d’experts de la « pauvreté », fonctionnaires ou non, super assistantes sociales doublées de spécialistes en orientations scolaires et en recrutement, chargés d’assister les « pauvres » selon des procédures administratives nécessaires et tatillonnes. Le second écueil serait de considérer les « pauvres » non comme des personnes momentanément fragiles mais comme des mineurs incapables d’exprimer leurs propres besoins.(« Rendre visibles les Invisibles », tel est le thème du groupe de  travail des Poissons Roses animé par Michel Simonnet).
La conséquence passée inaperçue concerne les « cathos sociaux », tous ces catholiques, souvent de gauche, si investis dans l’action sociale et qui consacrent temps, énergie et argent à accompagner les personnes en difficulté, parfois sous le regard condescendant des nantis, sans se soucier des quolibets. Un engagement de vie, au point que certains peuvent parfois négliger le message évangélique et sa transmission, réduisant involontairement l’église à une super ONG.
Notre société matérialiste rêve d’apporter à tous le bonheur matériel sans se demander si là réside le vrai bonheur. Une fois les besoins primaires satisfaits, l’homme attend beaucoup plus. Le pape François nous fournit une « méthodologie » prémonitoire avec « Laudato Si », Peut-être l’occasion pour les « cathos sociaux », dont nous sommes, de redécouvrir leur mission de porter le message du salut dans notre monde.

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